Un meuble étroitement lié à la liturgie
La chaire pastorale n’a pas fait couler beaucoup d’encre de la part des théoriciens de l’architecture protestante. Les questions pratiques, issues directement de sa fonction fondamentale -l’écoute de la Parole- l’ont imposée comme meuble central de la liturgie. C’est du haut de la chaire que se déroule l’essentiel de la liturgie.
Un emplacement stratégique
Deux emplacements sont privilégiés : dans l’axe du chœur ou légèrement déportée sur le côté dans les temples de tradition réformée, elle prend généralement place sur l’un des côté, à la jonction du chœur et de la nef dans les églises de tradition luthérienne (Paris, église luthérienne Saint-Jean). Des ajustements sont possibles en fonction de l’architecture : être parfaitement entendu de l’ensemble des fidèles, en l’absence de tout autre système de sonorisation, étant la priorité absolue.
Pour adapter l’emplacement de la chaire à l’importance de l’assistance qui peut entraîner des modifications des règles d’acoustique, certains temples ont mis en place des chaires mobiles (Saint-Véran, Hautes-Alpes). A la chapelle luthérienne de l’Ambassade de Suède à Paris, la chaire était montée sur roulettes. Et nous ne mentionnerons ici que pour mémoire les chaires démontables du Désert.
De manière symbolique, et depuis le 17e siècle, c’est au pied de la chaire qu’est « intronisé » le nouveau pasteur. Les promesses des futurs mariés lors d’un mariage ou des parrains et marraines lors d’un baptême sont reçues à ce même endroit.
Un meuble simple avec parfois des développements importants
Souvent simplement constituée d’une cuve en bois parfois en pierre, suspendue ou non, accessible par un simple escalier, et d’un abat-voix, la chaire pastorale peut connaître des développements importants et être accessible par deux escaliers. Elle forme parfois un seul meuble avec la table de communion (Lyon, temple des Terreaux), avec l’orgue (Lyon, Grand Temple ; Paris, temple de Pentemont). Elle est insérée dans les lambris du fond du chœur (temples de La Rochelle et Montbéliard, temple du Saint-Esprit à Paris).
Le décor est généralement réduit au strict minimum et contraste fortement avec l’exubérance que peuvent présenter les chaires à prêcher des églises catholiques : point d’anges et angelots, mais un vocabulaire décoratif réduit à quelques représentations symboliques : croix, Bible, Tables de la Loi, colombe du Saint-Esprit. Les chaires pastorales des églises de tradition luthérienne présentent souvent une ornementation plus riche que celles des églises de tradition réformée : les vertus théologales sont représentées (Charité (femme portant des enfants), Foi (croix) et Espérance (ancre)) sur la chaire du temple de Montbéliard.
Le sablier : un accessoire tombé en désuétude ?
Avant la généralisation des horloges, et pour contrôler la durée du prêche, le pasteur avait à sa disposition un sablier constitué d’une ou plusieurs ampoules. Des témoignages existent aujourd’hui au musée Oberlin (Waldersbach, 67) ou à l’église Saint-Mathieu (Colmar, 68). Un tableau de Jean Périssin, Temple de Paradis, peint vers 1565 (Genève, Bibliothèque publique et universitaire, en dépôt au musée international de la réforme) et un dessin représentant Paul Ferry, pasteur à Metz en 1653 (collection SHPF) témoignent de son usage.
Depuis le milieu du 20e siècle, avec le développement de la sonorisation, la chaire n’est plus indispensable. La liturgie et parfois la prédication, se font de plus en plus depuis un pupitre, ou un ambon, placé en avant de la chaire. Comme dans les églises catholiques où de nombreuses chaires à prêcher ont disparu, il convient de protéger ce patrimoine dont la symbolique reste forte dans une église protestante.