Une vie très engagée
Élisée Reclus naît à Sainte-Foy-la-Grande (Gironde) dans une grande fratrie, son père, pasteur calviniste puis professeur au collège protestant de Sainte-Foy, ayant eu quatorze enfants.
Il débute ses études au collège de Sainte-Foy, puis à 12 ans comme son frère Élie, il part pour le collège des Frères Moraves (luthériens) sur les bords du Rhin, qui reçoit des élèves de tous les pays. Rentré en France, il commence des études de théologie à la faculté de théologie de Montauban, mais en est exclu au bout de quelques mois pour son indiscipline et son ardent républicanisme. Séduit par les idées socialistes, il abandonne la théologie. En 1851, il se rend à Berlin et suit les cours de géographie sociale de l’université de la ville.
Retrouvant son frère à Strasbourg, il rentre au domicile familial, et publie son premier pamphlet anarchiste.
Lors du coup d’état de Napoléon III en 1851, Élisée et son frère Élie défendent les idées républicaines. À la veille d’être arrêtés, ils s’enfuient en Angleterre, où ils connaissent la misère. Élisée ira même jusqu’aux États-Unis où il trouvera un poste de précepteur dans une famille de planteurs, d’origine française près de la Nouvelle-Orléans. Il y découvre la société d’esclavagisme.
De retour à Paris, il entre à la Société de géographie, y rencontre Blanqui et Proudhon, écrit de nombreux articles pour la Revue des Deux Mondes (géographie sociale, politique internationale, littérature) publie La Terre, prend contact avec l’anarchiste russe Bakounine et adhère publiquement à l’anarchisme. Il participe à de nombreuses réunions internationales centrées sur la paix, la liberté. Il crée en 1864, avec son frère Élie, une banque ouvrière, le Crédit du travail.
En 1870, pendant le siège de Paris, il s’engage dans l’armée, puis en 1871 pendant la Commune dans la Garde nationale ; arrêté, il est condamné à la déportation mais les savants étrangers (surtout britanniques) se mobilisent pour lui : le gouvernement français, devant ces longues listes de signatures, commue sa peine en dix années de bannissement.
Avec sa femme et ses deux filles, il s’installera en Suisse, à Lugano, y retrouvant Élie. Il commence sa grande œuvre, La nouvelle géographie universelle (19 volumes). En 1877, dans le revue Le travailleur, il affirme son communisme libertaire.
En 1880, grâce à l’amnistie pour les faits de la Commune, il revient à Paris et multiplie les voyages dans le monde entier. Les premiers volumes de son grand ouvrage, La nouvelle Géographie universelle, sont publiés, le 19e et dernier volume le sera en 1894. Traduite dans de nombreuses langues, Elisée acquiert une renommée planétaire, les distinctions honorifiques se multiplient, en particulier la grande médaille d’or de la Société de géographie de Paris.
En 1892, un poste de professeur à l’Université libre de Bruxelles lui est proposé, proposition ultérieurement retirée en raison des nombreux évènements anarchistes qui surviennent en Europe à la même période. L’Université Nouvelle est alors créée et les premiers cours de Reclus attirent de nombreux étudiants.
Ses dernières années sont marquées par de nombreuses publications associant géographie sociale et histoire philosophique. Son livre L’homme et la terre auquel il travaille depuis plusieurs années est publié peu de temps avant sa mort d’un infarctus du myocarde, le 4 juillet 1905 . Il est enterré à Bruxelles.
Toute l’œuvre d’Élisée Reclus est marquée par un idéal de libre conscience et de fraternité qu’il applique aux domaines autant scientifique que politique. Il croit à la fraternité des individus et de tous les peuples de la terre.
En 1897, il écrit dans L’évolution, la révolution et l’idéal anarchique : « Notre destinée, c’est d’arriver à cet état de perfection idéale où les nations n’auront plus besoin d’être sous la tutelle d’un gouvernement, c’est l’anarchie, la plus haute expression de l’ordre ». Il a rejeté le christianisme, mais la morale est la base de sa pensée politique et sociale.
Cette association de savant géographe et d’homme politique anarchiste a heurté le monde universitaire, d’où un relatif oubli d’Élisée.