Jeunesse
Jean Cauvin ou Calvin est né à Noyon en Picardie. Il est le fils d’un administrateur de biens au service des chanoines de Noyon et d’une mère catholique dévote morte prématurément. Calvin reçoit un bénéfice ecclésiastique qui lui permet de poursuivre des études d’abord à Noyon.
Après Noyon, il étudie à Paris aux collèges de la Marche et de Montaigu. Son père le destinait à la prêtrise mais, à la suite de démêlés avec les chanoines de Noyon, il oriente son fils vers le droit. Calvin étudie le droit à Orléans, puis à Bourges, auprès des meilleurs maîtres de son temps. L’étude du droit marque durablement la pensée de Calvin. Il considère toujours la loi de façon positive, contrairement à Luther.
À la mort de son père, il se tourne vers la théologie et les lettres. Son premier livre est un commentaire du De Clementia de Sénèque. Il fréquente les milieux humanistes et les cercles de théologiens où se discutent les idées nouvelles. Il apprend le grec et l’hébreu.
La conversion, l'exil
À quand remonte la conversion de Calvin ? Sans doute vers 1533, mais ce n’est pas clair. En 1534, il rompt définitivement avec l’Église catholique en résignant ses bénéfices ecclésiastiques. En 1534, Calvin se déplace fréquemment (Angoulême, Nérac, Paris, Noyon, Orléans).
Calvin se trouve à Paris quand éclate en 1534 l’affaire des placards. Durant la répression, il quitte définitivement la France et se réfugie à Bâle. Il y poursuit son travail théologique. Son premier texte dogmatique est l’introduction à la traduction en français de la Bible par son cousin Olivétan. Son second ouvrage est un résumé de l’essentiel de la foi chrétienne : L’institution de la religion chrétienne, (1536). Il s’agit de la première édition en latin de son œuvre majeure qu’il ne cesse de remanier et de développer toute sa vie durant.
L'appel de Genève
Calvin aurait pu continuer sa brillante carrière d’intellectuel sans un hasard providentiel. Il veut se rendre à Strasbourg. La route directe est fermée à cause des guerres. Il doit passer par Genève. Genève vient d’adopter la Réforme, sous l’influence du réformateur Guillaume Farel. Celui-ci, apprenant la présence de Calvin à Genève, pense aussitôt que l’auteur de l’Institution Chrétienne est l’homme qui pourra le mieux l’aider dans la tâche de structurer la Réforme à Genève. Il lui adresse un appel pressant. Calvin reste à Genève. Il tente de mettre en pratique ses idées, mais la tâche est rude.
Calvin et Farel s’opposent au gouvernement de la ville sur la question de l’autorité respective de l’Église et de l’État, notamment sur les sujets religieux. Ils n’ont pas le dernier mot et sont expulsés par les autorités de la ville en 1538.
Calvin à Strasbourg
À l’appel du réformateur Martin Bucer, Calvin s’établit à Strasbourg. Ce seront les trois plus belles années de sa vie. Il exerce les fonctions de pasteur et de professeur. Il fréquente de nombreux intellectuels. Il se marie avec une jeune veuve, Idelette de Bure, dont il aura un fils mort en bas âge. L’influence de Bucer est notable sur la pensée de Calvin, mais Calvin ne lui ménage pas ses critiques.
En 1540, vingt-cinq ans après Luther, Calvin rédige son Commentaire de l’Épître aux Romains. Il y manifeste clairement sa distance par rapport à Luther : il n’y pas d’opposition inconciliable entre loi et Évangile.
En 1541, il fait paraître son Petit traité de la Cène, où il définit une position médiane entre celles, inconciliables, de Luther et de Zwingli. La même année paraît la première édition en français de l’Institution Chrétienne, beaucoup plus développée que celle de 1536.
C’est à Strasbourg que Calvin accède à la reconnaissance internationale. Il accompagne Bucer à plusieurs colloques organisés par Charles Quint pour tenter de guérir la fracture entre les Églises. Il y rencontre Melanchton avec lequel il se lie d’amitié. Malgré l’intelligence de Melanchton et la modération de Bucer, tous ces colloques échouent.
Retour à Genève
En 1540, une majorité favorable au retour de Calvin se retrouve dans les conseils de la ville de Genève. On le supplie de revenir par deux fois, en 1540 et en janvier 1541. Calvin ne reviendra qu’en septembre 1541, pensant ne rester que six mois. Il y reste vingt-trois ans, jusqu’à la fin de sa vie.
Dès les six premiers mois, trois textes de Calvin structurent l’Église : Les ordonnances ecclésiastiques, Le catéchisme, La forme des prières c’est-à-dire la liturgie.
Il fait adopter, pendant le culte, le chant des psaumes traduits en vers par Clément Marot. L’année suivante il accueille celui-ci à Genève.
Genève est attaché au nom de Calvin, pourtant Calvin s’y sent souvent mal à l’aise. Il y est un étranger jusqu’en 1559, où il obtient le statut de bourgeois de la ville.
Il est en butte à l’hostilité des conseils de la ville jusqu’en 1555. On voit souvent Calvin comme un dictateur à Genève. En fait, il n’a jamais été favorable à une emprise du pouvoir religieux sur le pouvoir politique.
Calvin prédicateur et écrivain
À son retour à Genève, Calvin reprend la prédication. Il prêche deux sermons par dimanche et il prêche quotidiennement une semaine sur deux en suivant un livre biblique. Ces milliers de sermons de Calvin ont été pris en note par ses étudiants, mais seule une partie a été conservée.
Contrairement à Luther, Calvin se méfie des méthodes de lecture médiévales de la Bible (allégorique et typologique). Il applique au texte biblique les règles de lecture des textes profanes. Il dénonce en particulier la confusion entre le sens littéral et le sens figuré. Par exemple, pour les paroles prononcées par Jésus lors de son dernier repas, « ceci est mon corps, ceci est mon sang… », le pain et le vin sont, pour Calvin, une figure de style, une image. Ils représentent le Christ, mais ne sont pas vraiment le Christ. De même que, dans la Bible, la colombe représente l’Esprit Saint, mais n’est pas l’Esprit Saint.
Dès 1541, Calvin traduit en français L’Institution de la religion chrétienne.
C’est un des premiers livres de théologie systématique traduit en français. Par cette traduction, Calvin contribue à fixer la langue française alors en pleine évolution.
Les écrits de Calvin en français sont très nombreux : commentaires bibliques, ouvrages de théologies, lettres, etc. C’est un des écrivains français les plus féconds du XVIe siècle.
L'affaire Servet
L’Espagnol Michel Servet est persécuté tant par l’Église romaine que par les Réformateurs pour ses traités antitrinitaires. Il considère le dogme de la Trinité comme non biblique et donc comme hérétique. Calvin condamne ses doctrines.
Michel Servet est arrêté à Genève et brûlé, après un procès pour hérésie, le 27 octobre 1553. L’exécution de Servet déclenche une polémique entre Calvin et Sébastien Castellion, défenseur de la tolérance religieuse.
Calvin et la France
Calvin exilé se soucie de la France et de ceux qui y ont adhéré à la Réforme. Par crainte des persécutions, ils vivent leur foi clandestinement et participent aux cérémonies de l’Église catholique. Calvin dénonce cette dissimulation et exhorte ses compatriotes à fuir vers des pays passés à la Réforme (Excuse aux Nicodémites, 1544). Ils arrivent massivement à Genève et la population de Genève double entre 1545 et 1560. Ils apportent à Calvin un soutien non négligeable.
À partir de 1555, de nombreuses Églises réformées sont créées en France. Calvin exhorte alors les protestants à rester dans leur pays. Il les soutient de ses conseils et en leur envoyant des pasteurs formés à l’Académie de Genève.
Pour le premier synode de Paris en 1559, il leur envoie un projet de confession de foi et de discipline. Par la suite il leur envoie de nombreuses lettres pastorales.
Les dernières années
La création d’une académie, en 1559, contribue à la réputation de Genève. L’enseignement théologique qui y est donné insiste sur l’étude et l’interprétation des Écritures.
L’Académie de Genève est dirigée par le français Théodore de Bèze. En raison de la qualité des maîtres, elle connaît un grand rayonnement.
À partir de 1555, l’autorité de Calvin à Genève n’est plus contestée. Le modèle genevois se diffuse largement en Europe. En 1559, il donne sa forme définitive à l’Institution Chrétienne, qui compte désormais quatre livres et quatre-vingt chapitres. Il écrit de nombreux traités (contre les anabaptistes, les libertins, l’astrologie, les reliques etc.). Il donne des cours publics à l’Académie de Genève qui vient d’être fondée. Il y fait une exposition continue des livres de la Bible.
De santé fragile, ce travail intense et soutenu l’épuise. Il meurt le 27 mai 1564 à l’âge de cinquante-cinq ans. Théodore de Bèze continue son œuvre.