Les anabaptistes au XVIe siècle
L’anabaptisme est un des courants de la Réforme radicale du XVIe siècle. Il est né en Suisse. Il se distingue de la Réforme luthérienne et calviniste par le refus du baptême des enfants. Ses adeptes prônent le baptême des adultes croyants et donc rebaptisent ceux qui avaient été baptisés enfants, d’où le terme d’« anabaptiste », (ou daïfer en Alsace) c’est-à-dire rebaptiseur. Ils refusent également de porter l’épée, d’exercer une fonction publique et de prêter serment.
Cette tendance pacifiste est jugée séditieuse et dangereuse, en 1529 au moment où les Turcs sont aux portes de Vienne et menacent l’occident. Les anabaptistes sont impitoyablement pourchassés et persécutés.
Ils sont accueillis à Strasbourg par les réformateurs Bucer et Capiton puis dispersés en Alsace. Ils tiennent des assemblées clandestines et sillonnent l’Alsace pour prêcher le pacifisme évangélique. Ils sont emprisonnés en particulier à Riquewihr où ils étaient nombreux mais les exécutions sont exceptionnelles. À la fin du XVIe siècle, la répression se calme et la doctrine anabaptiste se propage.
L'immigration suisse
Le XVIIe siècle est très marqué par les bouleversements de la guerre de Trente ans (1618-1648). En 1648 l’Alsace devient française (mises à part certaines villes). La province entière est terriblement dévastée, la population décimée tant par les maladies, la famine que par la soldatesque. Après la guerre, les autorités royales ou princières font dès lors tout leur possible pour favoriser l’immigration en offrant des terres en friches et des exemptions d’impôts. Ces mesures attirent de nombreux anabaptistes suisses.
En effet en 1635-36, dans le canton de Zurich, berceau de l’anabaptisme, a lieu une recrudescence de la persécution. Les anabaptistes sont considérés comme des rebelles à cause de leur position pacifiste. Les adultes sont enfermés, les enfants placés dans de nouvelles familles, les biens sont saisis. Situation analogue dans le canton de Berne en 1670-71 avec, comme mesure supplémentaire, des déportations sur les galères vénitiennes.
Grâce à l’appui des réformés hollandais et des anabaptistes alsaciens, après bien des difficultés, les anabaptistes suisses peuvent immigrer en Alsace. À partir de 1650, ils s’installent là où personne ne veut s’établir et remettent en état, fermes et moulins seigneuriaux, en particulier dans le comté de Ribeaupierre. On assiste à un regroupement d’anabaptistes dans cette région où la tolérance religieuse est reconnue. De citadin, l’anabaptisme devient rural. Quelques Bâlois et Hollandais les rejoignent. En 1660 au moulin d’Ohnenheim, ils adoptent une confession de foi commune. Cette confession de foi est toujours en usage dans les communautés amish aux États-Unis.
Les anabaptistes obtiennent le droit de se réunir dans des lieux isolés. Les charges de prédicateurs, d’anciens ou de diacres sont électives. Outre la Bible, les anabaptistes se servent d’un recueil de chants appelé « Ausbund » dont la plupart des chants ont été composés en prison par des coreligionnaires. Il est encore en usage chez les amish.
L'émergence des amish
À la fin du XVIIe siècle, une soixantaine de familles de la région de Berne viennent s’établir dans la vallée de Sainte-Marie-aux-Mines sous la conduite de Jacob Amann. Celui qu’on nomme « le patriarche » s’offusque du mode de vie et de la discipline de la communauté anabaptiste alsacienne. Il exige une plus grande rigueur, en particulier une tenue vestimentaire empreinte de simplicité. La nouvelle communauté nommée « Jacob Amann’s Partie », puis Amish aux U.S.A. est née en 1693 après leur séparation avec les anabaptistes (en Alsace on continue à les appeler Daïfer). Ils sont regroupés essentiellement autour de Sainte-Marie-aux-Mines et grâce à leur travail acharné connaissent une éclatante réussite économique. Ils acquièrent les fermes et domaines les plus importants de la vallée. Leurs troupeaux sont plus nombreux et plus productifs.
Ils obtiennent quelques avantages :
- ne pas servir dans les milices,
- ne pas exercer la charge de receveur communal,
- remplacer le serment par la « Handtreue » (taper de la main en signe d’engagement).
Une compensation financière leur est demandée en échange.
La réussite de ces anabaptistes ne tarde pas à susciter des convoitises.