Une conversion quasi générale
Face aux dragons ou à l’approche de ceux-ci, les réformés abjurent massivement. Ils se convertissent à la religion catholique apostolique et romaine. D’où leur appellation de« nouveaux convertis » (N.C.).
Quelques-uns refusent d’abjurer. Malgré le dernier article de l’édit de Fontainebleau stipulant que ceux de la Religion Prétendue Réformée (R.P.R) peuvent « continuer leur commerce ou jouir de leurs biens sans pouvoir être troublés » à condition de ne pas faire d’exercice public de leur religion, ils sont le plus souvent persécutés et de toute façon leurs enfants doivent être baptisés et élevés dans la religion catholique.
L'obligation catholique
À la révocation, les « nouveaux convertis » (N.C.) perdent leur identité sociale et culturelle et doivent se soumettre à l’obligation catholique :
- aller à la messe,
- communier à Pâques,
- faire baptiser leurs enfants,
- envoyer leurs enfants au catéchisme,
- recevoir l’extrême onction à l’article de la mort.
L’accueil des nouveaux convertis pose des problèmes dans les régions protestantes ou les villes protestantes. Il faut agrandir les églises catholiques pour accueillir cette nouvelle population ou en construire de nouvelles, par exemple à Montauban.
Il faut aussi catéchiser ces nouveaux convertis. Le roi ordonne une distribution gratuite d’ouvrages pieux, de catéchismes catholiques et même de Nouveaux Testaments traduits en français par le père Amelot. Les missions catholiques continuent dans les régions protestantes pour instruire les nouveaux convertis. Des conférences sont organisées par des docteurs de la Sorbonne. Fénelon lui-même en donne en Saintonge.
En 1686, le roi délègue aux curés le soin de contrôler les nouveaux convertis. Ceux-ci établissent des listes de nouveaux convertis avec des annotations. Ils deviennent ainsi les agents de la répression du pouvoir royal. Ils dénoncent les mauvais catholiques, ceux qui ne vont pas à la messe ou ne communient pas à Pâques, ou ceux qui n’envoient pas leurs enfants au catéchisme catholique. Ceux-ci peuvent se voir confisquer leurs biens, ou retirer leurs enfants pour les placer dans des établissements catholiques.
La résistance des « nouveaux convertis »
Les nouveaux convertis tentent de diverses manières de se soustraire à « l’obligation catholique ». La première est la fuite malgré l’interdiction d’émigrer répétée en 1699 et une nouvelle fois en 1713.
La deuxième est la résistance passive : s’abstenir d’aller à la messe ou d’envoyer ses enfants au catéchisme dès que les dragons s’éloignent. De fait l’assistance à la messe est plus surveillée pour les notables que pour le petit peuple. En 1689, les curés d’Anduze constatent que seulement 10 % des nouveaux convertis ont communié à Pâques.
Pour ceux qui sont obligés d’envoyer leurs enfants au catéchisme catholique beaucoup défont le soir à la maison l’enseignement catholique et transmettent à leurs enfants leur rejet du catholicisme.
Selon les termes de l’édit de Fontainebleau, le baptême catholique est obligatoire. Les nouveaux convertis s’y soumettent pour donner un état civil à leur enfant, car désormais seule l’Église catholique peut tenir les registres d’état civil. Par contre il n’est pas question de mariage dans l’édit. Certains nouveaux convertis acceptent le mariage catholique. D’autres font seulement un contrat de mariage devant notaire, mais leurs enfants sont alors illégitimes.
En ce qui concerne l’extrême onction, les nouveaux convertis trouvent toutes sortes de ruses pour y échapper (déclaration de mort subite, absence d’appel du médecin qui a obligation de déclarer l’état du malade au pouvoir civil et au curé).
La résistance devient active par le maintien d’une pratique religieuse familiale ou des réunions privées avec des voisins. Les pasteurs du Refuge cherchent à favoriser ces réunions privées en imprimant des « liturgies pour les chrétiens privés de pasteur ».
Mais très vite, dans les régions méridionales, les nouveaux convertis s’assemblent dans des endroits reculés pour célébrer le culte protestant. Ce sont les « assemblées » clandestines.
Elles sont cruellement réprimées.