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Les Réveils

Les Réveils du XIXe siècle s’inscrivent dans le contexte du romantisme. Ils mettent en place une piété plus existentielle et sentimentale, « réveillée » par rapport à une foi jugée affadie ou routinière.

Origine des Réveils

Colporteur biblique
Colporteur biblique © Mours

Dans le monde protestant, on désigne sous le nom de « Réveils » des mouvements qui veulent « réveiller » une foi jugée assoupie affadie et routinière. Les Réveils veulent susciter une piété plus existentielle, plus sentimentale, plus engagée et plus démonstrative, qui se fonde sur une expérience personnelle plus que sur l’adhésion à un enseignement. Ils représentent une protestation contre une religion à dominante intellectualiste. Ils donnent une grande place au sentiment, en accord avec l’atmosphère romantique et en proximité avec la définition de la foi comme sentiment qu’on trouve chez le théologien allemand Schleiermacher, qui est aussi un des pères du libéralisme.

Ils se nourrissent du méthodisme anglais et du piétisme luthérien. Ils se caractérisent par les traits suivants :

  • L’appel à se convertir, ce qui ne veut pas dire « changer de religion », mais « passer d’une foi conventionnelle à une foi vivante ». La conversion, considérée comme une « nouvelle naissance », parce qu’elle change profondément l’existence, est une expérience spirituelle et existentielle qu’on peut dater et localiser précisément (elle s’est produite tel jour, à telle heure, dans tel endroit). Elle est due à l’action de Dieu dans le cœur du converti.
  • L’exaltation joue un rôle essentiel. Le chant y contribue, ainsi qu’une prédication qui cherche à ébranler et à toucher affectivement les auditeurs. Quelques phénomènes hystériques au cours de campagnes de Réveil ont suscité méfiance et dérision.
  • La très grande insistance sur la Bible. On institue des groupes d’études pour mieux la connaître. On en fait une lecture plus existentielle qu’historique ou philologique. Les Réveils travaillent à la diffusion de la Bible par les Sociétés Bibliques.
  • Les Réveils reprennent des thèmes classiques : le salut de l’homme pécheur grâce au sacrifice du Christ sur la croix, en insistant sur l’expérience du péché et de la régénération. Ils évoluent sous l’influence du théologien suisse Alexandre Vinet qui est un maître à penser à la fois du Réveil et du libéralisme.
  • L’importance de l’évangélisation. Tout chrétien converti doit travailler à répandre l’évangile et à propager la foi par la parole et le livre. Le colportage de journaux et de petits traités se développe. Les Réveils sont à l’origine de la création de nombreuses œuvres et de la mission dans les pays lointains (Afrique et Pacifique surtout).
  • Les Réveils sont plutôt progressistes sur le plan social : ils se préoccupent de l’éducation, des soins de santé, des secours aux miséreux. Les femmes y jouent un rôle considérable, et accèdent à des responsabilités presque à l’égal des hommes.

Implantation en France

Félix Neff
Félix Neff © S.H.P.F.

Des prédicateurs suisses, et surtout britanniques, parcourent la France et y propagent le Réveil. Ami Bost et Charles Cook sont les plus connus. Ils introduisent des habitudes anglo-saxonnes : réunion en petits comités plutôt que grandes assemblées, chant de cantiques, aux airs et paroles de style romantique, alors que les réformés traditionnellement ne chantaient que des psaumes.

Le Réveil prend pied à Paris dans les salons de la haute bourgeoisie et de l’aristocratie, ainsi celui de Madame de Staël, très engagée dans la lutte contre l’esclavage, et ensuite dans celui de sa fille, la duchesse de Bröglie. La chapelle Taitbout, église indépendante, est fréquentée par un monde cosmopolite et élégant dont le soutien financier sera déterminant pour les œuvres protestantes.

Le Réveil atteint aussi la Province et les campagnes. Dans les Hautes-Alpes, Félix Neff, qui associe évangélisation, alphabétisation et développement économique, a un grand rayonnement.

D’un côté, les Réveils créent des communautés (souvent dissidences de paroisses réformées) indépendantes de l’État. De l’autre ils infiltrent les paroisses concordataires et y sont présents et actifs, sous une forme souvent assagie. L’organisation religieuse du XIXe siècle donne à chaque paroisse une grande indépendance. Orthodoxes et libéraux tiennent à des Églises liées à l’État parce que ce lien empêche, selon eux, que des petits groupes s’emparent des paroisses et se les annexent. Les partisans du Réveil, penchent plutôt pour la séparation des Églises et de l’État qui leur permettrait, pensent-ils, de renforcer leur influence.

Bibliographie

  • Livres
    • MUTZENBERG Gabriel, A l’écoute du Réveil, Emmaüs, 1991

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