La critique du traité de Versailles
Le traité de paix signé à Versailles en 1919 impose de lourdes conséquences à l’Allemagne : il comprend une démilitarisation du pays et des restrictions économiques, ainsi qu’une lourde dette. Le traité est jugé injuste et dénoncé par certains intellectuels, comme Charles Gide (1847-1932), professeur d’économie politique à l’université. Selon lui, la France n’a aucun intérêt à voir sa voisine ruinée ; au contraire, Charles Gide encourage la reprise des relations économiques, politiques et religieuses avec l’Allemagne. Ce traité est également fortement critiqué parce qu’il accuse l’Allemagne d’être l’unique responsable de la guerre.
Néanmoins, le traité de paix présente des avantages tels que la démilitarisation de pays européens, mais aussi la création de la Société des Nations (SDN) dont l’objectif est la préservation de la paix en Europe. Les intellectuels protestants conservent leur idéal pacifique, malgré la guerre. Ils espèrent une reprise des relations internationales protestantes, parce qu’ils pensent que le dialogue reste le meilleur moyen de maintenir la paix.
Écrire la mémoire
Après la guerre, un grand nombre d’anciens combattants, traumatisés par leur vécu, écrivent sur leur expérience personnelle de la guerre. Ils veulent sensibiliser les générations futures afin d’éviter un nouveau conflit mondial.
Fils de pasteur, professeur de littérature française ayant passé 28 mois dans les tranchées, Jean Norton Cru (1879-1949) va trier et rassembler, dans un volume simplement intitulé Témoins (1929), trois cents témoignages de guerre afin de constituer un ouvrage qu’il considère comme « une arme anti-guerre ». J. N. Cru se fait ainsi le premier archiviste des tranchées, souhaitant « écarter un certain nombre de ‘faux’ témoins et de vrais menteurs ».
A travers ces divers récits de témoins oculaires, le lecteur découvre l’horreur du front, la mort, les blessés, les obus… mais aussi une solidarité entre les soldats de toutes confessions. En effet, des catholiques prient en compagnie de protestants, des aumôniers prennent en charge tous les croyants… une camaraderie se créée dans les régiments, les soldats se soutiennent et s’allient pour affronter ensemble les batailles ; ils ne se distinguent plus par leur religion ou la communauté à laquelle ils appartiennent dans le civil, ils appartiennent tous au même régiment et affrontent la même horreur. Ainsi est créée une communauté de combattants qui partagent un même vécu qu’ils veulent relater.
La conscience de guerre
L’Europe des années 1930 assiste à une montée des régimes totalitaires. Des intellectuels protestants s’inquiètent pour la liberté d’expression et la liberté de culte. La guerre semble inévitable, le pacifisme qui animait les protestants après 1918 s’efface. Une prise de conscience s’opère : il serait souhaitable d’anéantir les régimes totalitaires appliquant une politique de répression.
A la veille de la Seconde guerre mondiale, dans l’esprit des intellectuels protestants, il ne s’agit plus de défendre la nation comme en 1914, mais de défendre les libertés acquises. Un certain nombre d’entre eux entrent en résistance avec d’autres personnes dont ils partagent pour seul principe : stopper les régimes totalitaires. Ils sont inspirés par des romans tels que Roux le bandit (1925), dont la démarche n’est plus considérée comme celle d’un déserteur, mais comme un maquisard. L’auteur de ce roman, André Chamson, dira lui-même, à propos de son personnage, que « s’il avait encore eu l’âge où l’on peut se battre, il aurait pris place au milieu des Volontaires de l’An 44 ». Roux incarne alors un modèle de la résistance.
A la sortie de la Grande Guerre, la communauté internationale protestante est éclatée ; vingt ans plus tard, à la veille d’un second conflit mondial de nature bien différente, elle va réunir ses forces afin de lutter contre un ennemi commun.