Sa vie
Victor Baltard naît le 10 juin 1805 à Paris. Il est le fils de Louis-Pierre Baltard, architecte catholique, et d’Amélie Romain-Debrasseur, convertie au protestantisme luthérien. Il est élevé comme ses neuf frères et sœurs dans la religion protestante. Il se marie le 8 octobre 1833 à l’église luthérienne des Billettes, avec Adélaïde Lequeux, dont il a une fille, Pauline, qui se convertit au catholicisme pour épouser Edmond Arnould en 1853.
Après des études classiques à la Sorbonne, il est reçu premier à l’école des Beaux-Arts, section architecture, en 1823, puis en 1827 à la section peinture. Grand prix de Rome en 1833, il séjourne cinq ans à la Villa Médicis. Durant son séjour, il se passionne pour les monuments anciens et se lie avec les peintres Hippolyte Flandrin, rénovateur de la peinture religieuse, et surtout Ingres ; il bâtit leurs deux tombes au cimetière du Père Lachaise.
Il rentre en France au moment du retour des cendres de l’empereur Napoléon Ier et participe au concours pour le tombeau de l’empereur. Classé premier, il reçoit une médaille d’or, aussitôt revendue ; Il est cependant évincé au profit d’un concurrent nommé Visconti ; mais le gain de notoriété lui permet de recevoir des commandes et surtout d’entrer dans l’administration.
Nommé inspecteur des Beaux-Arts de la ville de Paris en 1842, il y fait toute sa carrière comme conservateur des édifices diocésains puis inspecteur général des bâtiments civils et enfin directeur du service d’architecture en 1860. Président de la Société centrale des Architectes français, il est élu membre de l’Académie des Beaux-Arts en 1863, et promu la même année officier de la Légion d’honneur. Homme de culture, il est aussi membre de l’Association pour l’encouragement des études grecques en France.
Il meurt à Paris à 68 ans le 13 janvier 1874. Son service funèbre est célébré le 15 janvier 1874 à l’église luthérienne de la Rédemption.
Les édifices civils
En 1845, il supervise la construction du nouvel Hôtel du timbre ; il travaille ensuite à la décoration de l’Hôtel de ville, en bâtissant son grand escalier (aujourd’hui détruit) et les bâtiments éphémères utilisés pour les grandes cérémonies du Second Empire, puis aux grands abattoirs de la Villette ; Il est également l’auteur du berceau d’apparat offert par la Ville de Paris à l’empereur Napoléon III à l’occasion de la naissance du prince impérial en 1856.
Son œuvre la plus connue est l’ensemble des pavillons des Halles centrales de Paris : Napoléon III, après Louis-Philippe, reprend en effet le projet de Napoléon Ier de reconstruire ce qui était, depuis le douzième siècle, le marché central de Paris, projet appelé « le Louvre du peuple ». Baltard propose en 1853 un projet accepté par le Conseil municipal après de longs débats ; un premier pavillon est construit, mais jugé trop lourd (il est surnommé « le fort des Halles »), il est détruit. Baltard affine son projet en choisissant, pour les douze pavillons, des matériaux qu’il utilise judicieusement : le fer, la fonte et la brique et de vastes verrières. C’est un succès sans précédent et il est copié partout dans le monde. L’ensemble est détruit au début des années 1970, après le transfert des Halles à Rungis, au profit d’un centre commercial souterrain, appelé Forum des Halles ; un pavillon est cependant préservé et reconstruit à Nogent-sur-Marne.
Les églises catholiques
Ses fonctions municipales conduisent Baltard à superviser l’entretien et la décoration des églises de Paris, notamment Saint-Eustache, Saint-Merri, Saint-Séverin, Saint Thomas d’Aquin, Saint-Philippe du Roule et bien d’autres ; c’est sous son influence que les peintures murales remplacent progressivement les tableaux : le modèle en est Saint-Germain-des-Prés, où son ami Flandrin réalise un décor archaïsant. Il construit également l’église Saint-Augustin, son œuvre la plus célèbre, qui est un véritable tour de force technique, le terrain, quadrangulaire et trop étroit, ayant rebuté tous les autres candidats ; grâce à l’emploi d’armatures en fer il surélève le chœur, le surmonte d’un baldaquin et parvient à édifier sans contreforts un dôme de plus de 60 mètres de haut.
Les temples protestants
Baltard souhaite construire un temple en face de Saint-Augustin, projet qui se heurte à l’impératrice Eugénie qui, souhaitant être enterrée dans cette église, ne supporte pas l’idée qu’un temple soit visible du parvis ; elle impose qu’il soit relégué dans une petite rue voisine, la rue Roquépine, avec une façade neutre et sans clocher (le clocheton actuel n’est ajouté qu’au début du XXe siècle). Le plan d’ensemble du temple du Saint-Esprit est remarquable de modernité et de fonctionnalité, avec une salle octogonale pouvant contenir 700 places, ce qui en fait l’un des plus grands temples de Paris ; la salle est éclairée par une verrière zénithale et de vastes espaces de circulation desservent tout l’immeuble.
Baltard est également l’auteur des plans du temple de Nérac (Lot-et-Garonne).
L’abbatiale de Pentemont, attribuée aux protestants en 1802 par Napoléon, ne leur revient après bien des difficultés qu’en 1844, et Baltard est chargé de son aménagement : il condamne la porte monumentale et transforme en portes deux fenêtres latérales, installe des boiseries avec des tableaux de cantiques et une chaire à double escalier. Une bonne partie de ces travaux disparaissent lors d’une « rénovation » dans les années 2000.