Descendant d'une famille huguenote française émigrée en 1685
Benjamin Constant descend d’une famille huguenote de l’Artois devenue protestante au XVIe siècle et qui à la révocation de l’édit de Nantes s’est expatriée pour se fixer en Suisse dans la région de Lausanne. Son père est militaire et sa mère, Henriette de Chandieu, meurt à sa naissance. Il reçoit une éducation très disparate, livré à des précepteurs plus ou moins médiocres, mais il se révèle d’une intelligence très précoce. Après être resté six années au service du duc de Brunswick (chef des armées alliées lors de l’invasion de la France en 1792), il revient à Lausanne où il rencontre en 1794 Madame de Staël. Leur liaison dure plus de quinze ans, avec des hauts et des bas (la rupture dure cinq ou six ans). Il la suit à Paris et se lance dans l’action politique : il s’est fait naturaliser français en vertu de la loi de 1790 qui accorde les droits civiques aux descendants de familles autrefois expatriées pour cause de religion.
Son action politique à trois périodes de sa vie
- Deux ans au Tribunat sous le Consulat : Il défend une politique du juste milieu. Il participe jusqu’en 1802 au combat des républicains modérés contre les tentatives des royalistes ou celles des patriotes ardents. Membre deux ans du Tribunat, il en est exclu par Bonaparte et il est banni en même temps que Madame de Staël. Il s’établit à Weimar, avec de fréquents séjours à Coppet auprès de Madame de Staël.
- Deux mois pendant les Cent Jours : Napoléon lui donne la mission de rédiger la nouvelle constitution.
- Treize ans sous la Restauration : il est l’un des chefs du parti libéral et son seul théoricien. Député de la Sarthe, de Paris, du Bas-Rhin pendant huit ans, orateur remarquable, il est un ardent défenseur de toutes les libertés individuelles dans le cadre de la charte de 1814. Les Ultras le craignent, les Doctrinaires lui ferment les portes de l’Académie, dans son parti l’aile gauche libérale le trouve trop modéré ; mais il occupe une grande place dans l’opinion publique.
Ce combat est poursuivi dans la presse ainsi que par la publication de nombreux ouvrages politiques (Cours de politique constitutionnelle, etc.). Toute sa vie, il fait un effort considérable pour repenser les conquêtes de 1789 selon un parcours réformiste. Mais ses préférences vont à une monarchie de type constitutionnel : monarchie et pairie conservatrice associées à une Chambre élue avec un système censitaire, et des ministres responsables devant le pouvoir législatif ; et séparation du pouvoir judiciaire. Il meurt le 8 décembre 1830, des funérailles triomphales sont organisées : les étudiants détèlent les chevaux du char funèbre et le tirent eux-mêmes au cimetière du Père-Lachaise.
Toujours en recherche sur le plan religieux
Constant a varié dans ses opinions religieuses, à des époques de crises dans sa vie personnelle, il s’est rapproché de croyances qu’il a abandonnées par la suite. Mais pour lui, l’homme a besoin de la religion pour être homme même si Dieu reste indéfini, croyance ou simple espoir. Sa grande œuvre en ce domaine est son ouvrage paru en sept volumes de 1824 à 1833 mais auquel il travaille depuis vingt ans, De la religion, une apologie du sentiment religieux. Il y expose que le sentiment religieux ne peut être reconnu que dans ses manifestations : soif d’immortalité, besoin d’harmonie de l’homme avec le reste de la nature, pressentiment d’un lien avec un être supérieur. Constant établit une différence entre le sentiment religieux, qui met l’homme en communication avec une puissance invisible, et les formes religieuses imposées par l’Église. Dans ses moments de crise ou de désespoir, il n’hésite pas à prier Dieu, mais généralement sa foi reste mal définie, et il considère que « le sentiment religieux est très compatible avec le doute et qu’il est même plus compatible avec le doute qu’avec telle ou telle religion ». Mais ce doute est positif, il apporte le progrès : du doute naît le renouveau car toute croyance établie est une barrière. Il pense que l’engagement moral et social fait partie de la religion avec les valeurs les plus hautes, la liberté et la dignité humaines. Pour lui la liberté est le fondement même de la religion qui ne peut se développer qu’en dehors de toute intervention de l’autorité. « J’ai défendu quarante ans le même principe, liberté en tout, en religion, en philosophie… en politique ».
Maître en matière d'analyse psychologique dans son œuvre littéraire
Citons son roman le plus célèbre Adolphe.