Après des études de théologie, il est précepteur, professeur, journaliste, écrivain
Né à Valleraugue en Cévennes (Gard) d’une mère catholique et d’un père protestant (la famille Angliviel est protestante depuis le XVIe siècle), il est baptisé par le curé de la paroisse, comme cela devait se faire alors – sous le régime de l’édit de Fontainebleau (1685) et par la suite.
Il fait ses classes au collège de l’Enfant-Jésus à Alès. Mais, de retour à Valleraugue, il vit une crise religieuse qui le ramène au protestantisme.
Il décide alors se rendre à Genève afin d’y poursuivre des études de théologie (1745).
De là, il part pour le Danemark où il est d’abord précepteur dans une famille, puis professeur de langue et belles-lettres françaises à Copenhague.
En 1750, il est à Paris, puis de nouveau à Copenhague d’où il rejoint la Hollande et ensuite Berlin (1751) où il rencontre Voltaire.
Sa querelle avec Voltaire
La Beaumelle a un caractère entier, exigeant et il ne craint pas le combat. Il s’affronte à Voltaire en dénonçant la légèreté de l’information du Siècle de Louis XIV et en soulignant les
négligences et les erreurs de l’ouvrage. Il s’ensuit une querelle qui prend l’allure d’une affaire d’État, et dessert considérablement La Beaumelle.
Voltaire lance contre La Beaumelle Le Supplément au Siècle de Louis XIV, auquel La Beaumelle s’empresse de répondre. C’est la Réponse au supplément du Siècle de Louis XIV où La Beaumelle, en un violent réquisitoire, s’en prend à la politique religieuse de Louis XIV. Il conteste notamment les chefs de condamnation de Claude Brousson (1647-1698). Voltaire aurait prétendu que Brousson avait été roué comme criminel d’État, et non comme hérétique, car Voltaire considère le prophétisme cévenol comme un mouvement séditieux.
L’œuvre de La Beaumelle souffre du jugement négatif émis par Voltaire à son encontre. En outre, étant un homme seul, n’appartenant à aucun clan, il n’est pas en mesure de se défendre lorsque Voltaire le dépeint comme un homme dangereux, dont les écrits portent ombrage au gouvernement. C’est ainsi que, sur dénonciation de Voltaire, il fait deux séjours à la Bastille (1753 et 1757).
À sa sortie de prison, la Beaumelle est exilé dans son Languedoc natal. En 1758, il est à Nîmes et, l’année suivante, à Montpellier, puis il s’installe à Toulouse.
Défense de Jean Calas
En 1761, Jean Calas, marchand protestant de Toulouse, est accusé d’être l’auteur de la mort par pendaison de son fils qui se serait convertit au catholicisme. La Beaumelle est le premier à le
défendre : il rédige un écrit intitulé La Calomnie confondue où il démontre le caractère diffamatoire des allégations lancées par le clergé toulousain contre Jean Calas. Cet écrit est publié par le pasteur Paul Rabaut (1718-1794).
Diversité de son œuvre et originalité de sa position intellectuelle
La Beaumelle occupe une position originale dans le monde des lettres, dans la mesure où il est un acteur important des échanges culturels entre le royaume de France et les pays du Refuge. La Beaumelle joue un rôle important dans la lente conquête de la tolérance civile par les protestants. Il réclame la liberté de conscience.
Il est un auteur extrêmement précoce. Dans L’Asiatique tolérant (1748), véritable traité sur la tolérance adressé au roi de France Louis XV, La Beaumelle, par prudence, ne dévoile pas son
identité. Il tente de démontrer que la tolérance est inséparable d’un véritable christianisme. Il insiste aussi sur le fait que l’État ne saurait agir sans faire preuve de la tolérance civile. Il réclame la liberté de conscience pour les protestants français. Il va jusqu’à justifier la révolte contre le tyran.
Il crée un périodique La Spectatrice danoise ou l’Aspasie moderne (1749-1750), dans lequel il attaque l’athéisme et le déisme et prône la tolérance civile. Il publie ensuite Mes pensées, ou le qu’en dira-t-on ? (Copenhague, 1751), ouvrage dans lequel certains peuvent déceler des liens entre le calvinisme professé par La Beaumelle et le républicanisme, considéré à l’époque comme une hérésie politique majeure.
En 1755-1756, il publie à Amsterdam les 15 volumes de ses Mémoires pour servir à l’histoire de Madame de Maintenon et à celle du siècle passé.
Le succès de ces deux derniers ouvrages est immédiatement éclatant. Mais, dans les deux cas, il s’agit d’ouvrages hardis, impliquant des sujets délicats, mettant en cause des personnages
connus de tous et donc susceptibles d’attirer à son auteur de nombreuses difficultés, objections, voire oppositions. En 1762-1763, il correspond avec le pasteur Paul Rabaut, et il
rédige les délibérations que Rabaut soumet au synode national de 1763.
Son Catéchisme universel reste inédit (1763), sans doute par prudence. Son but, dans cet ouvrage composé comme un dialogue, est de répondre aux questions posées exclusivement par des textes bibliques.